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Une éblouissante Anna Karénine


Une éblouissante Anna Karénine
L'auteur nous pardonnera de reproduire ici l'article qui suit, aussi élogieux qu'enthousiaste, consacré à une nouvelle version cinématographique d'Anna Karénine.   





En direct de Toronto, Keira Knightley, éblouissante Anna Karénine
 


Par Thierry Chèze (Studio Ciné Live), publié le 07/09/2012.
L'EXPRESS - Culture  ( http://www.lexpress.fr/culture/  )

La comédienne anglaise retrouve son réalisateur fétiche Joe Wright pour une adaptation audacieuse de Tolstoï, qui ne laissera personne indifférent. Toronto 2012, c'est parti !

[…] Joe Wright revient à ce qu'il maîtrise le mieux: le film en costumes. Et retrouve sa muse, Keira Knightley, qu'il avait dirigée avec superbe et élégance dans Orgueil et préjugés et Reviens moi. 
Cette fois-ci, il part à l'assaut d'un Everest: adapter Anna Karénine, le chef d'œuvre de Tolstoï. Avec en filigrane, deux interrogations: comment s'emparer de ce sommet de la littérature russe sans répéter ce qui s'est déjà fait? Et pourquoi le porter à l'écran aujourd'hui?
Dès les premières images, ces interrogations volent en éclat. Wright adapte Anna Karénine aujourd'hui parce qu'il y voit une histoire intemporelle et universelle. Mais il s'y emploie avec une ambition formelle immense grâce à laquelle il entend traduire par l'image la fièvre de ce récit.
A l'écran, les changements de décors se font à vue d'œil, le travail sur le son, tout à la fois délicat et puissant, les mouvements chorégraphiés. On pense à Baz Luhrmann dans ce désir de raconter une histoire avec force bruit et fureur. Joe Wright réussit à marier cinéma et théâtre à l'écran, exercice souvent tenté mais rarement réussi. En assumant leurs différences et, mieux, en les confrontant. 
Son Anna Karénine ressemble à un ciel d'orage, peuplé de mille et un éclairs. Et traduit ce que vit son héroïne, épouse, en cette fin du XIXe siècle, d'un puissant homme politique russe qui tombe éperdument amoureuse d'un jeune conte pour qui elle est prête à tout quitter. La scène de bal qui marque leur rencontre ou la reconstitution d'une course de chevaux qui la montre pour la première fois trahir cet amour impossible touchent à une somptuosité surréaliste.
Certains parleront sans doute de maniérisme et auraient préféré qu'on se contente de raconter cette histoire sans effet. Mais il y a du romantisme, du romanesque, de l'emballement, des cris, des larmes, des rires dans le travail de Joe Wright. Il y a aussi et surtout une actrice qui, de film en film, dévoile la puissance de son jeu, tant dans la retenue que dans la rage.
Keira Knightley est une Anna Karénine à la fois espiègle et bouleversante. Un simple regard dans le vide, un silence lui suffisent pour passer d'un extrême à l'autre dans la peau de ce personnage incroyablement riche, guidé par les battements éperdus de son cœur. Une deuxième nomination aux Oscars lui tend les bras. Mais elle ne devrait pas être seule ce soir-là. A ses côtés, Jude Law signe sans doute sa composition la plus réussie depuis des années. 
Quelle belle idée Wright a eu de lui confier le rôle du mari d'Anna Karénine, de l'homme amoureux rigide et bafoué. Pour la première fois depuis des lustres, on ne lui demande pas de jouer la séduction. Pour la première fois depuis des lustres, il n'est pas en mode pilote automatique, un sourire craquant par ci, un regard rieur par là. Il s'appuie sur aucun artifice. Il joue et crève l'écran. […] 

Jean Maiboroda