texte manuscrit de la princesse Youssoupoff relatant son séjour à CALVI .
Selon nos renseignements, ce manuscrit aurait été acquis par le Musée-domaine d'Arkhangelskoïe ,
ancienne demeure de la famille Youssoupoff
MÉMOIRES DE LA PRINCESSE IRINA YOUSSOUPOFF INTITULÉS « LA VIE À CALVI » OU « JOURNAL D’ISIDORE VESTALKINE » Texte autographe manuscrit, entièrement rédigé de sa main, datant de 1927, texte en russe reparti sur cinq cahiers d’écolier, totalisant 174 pages, format grand in-4°. Usures du temps, en l’état. 5 000/7 000 €
(Passionnant récit humoristique retraçant la vie quotidienne du prince et de la princesse lors de leur séjour à Calvi, après y avoir acheté deux maisons en 1924. Les principaux personnages de ce récit sont : le prince Youssoupoff, la princesse Youssoupoff, la Grande-duchesse Maria Pavlovna, le prince Vassily Alexandrovitch Romanoff, Makaroff et Yakovleff, Faoukhan Kerefoff et sa maîtresse Suzanne, Anna Mikhaïlovna et Vladimir Ivanovitch, un baron français, Daniil Volkonski ainsi que Magomète, Bleïk et l’architecte Pinelli. La princesse Youssoupoff a indéniablement un talent pour l’écriture. En lisant ce récit, nous nous retrouvons plongés, au fil de sa plume, dans un tourbillon d’évènements. Les héros sont en perpétuelle action. Leur vie à Calvi nous est présentée par Isidore Vestalkine, selon la vision et la perception qu’il en a. Le plus souvent, il n’apprécie guère le comportement des héros aristocrates de ce récit, il en est même parfois choqué. Il parle de sa déception quant aux manières, à la grossièreté et aux habitudes de ces hauts dignitaires. Le plus probable est que ce texte ne fut écrit par Irina que pour elle et ses amis. Malgré sa timidité apparente et sa réputation de femme silencieuse, elle possédait un très grand sens de l’humour. Le style du récit est gai et vif mais aussi rapide et éclatant).
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J'ai choisi les extraits qui parlent de la Corse car il y a quelque temps, j'ai découvert le site de l'association Kalinka-Machja (Russes et Ukrainiens en Corse). J'y ai surtout découvert l'histoire du comte Pozzo di Borgo, le "Corse du tsar". Très intéressant ! Quelque part, le nom du prince Youssoupov a dû apparaître (en parlant de "Chez Tao" probablement). Donc, un petit hommage aux liens entre la Russie et la Corse sur mon blog !
"En exil"
Chapitre VIII
1924-1925
Voyage en Corse. - Nous achetons deux maisons à Calvi. - La gentillesse des Corses.
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p. 301
Un bateau était en partance pour la Corse. Le temps d'y embarquer la voiture et nos personnes, nous étions partis pour l' "Ile de Beauté".
Nous la parcourûmes en tous sens, et lorsque nous arrivâmes à Calvi, notre enchantement était à son comble. Une maison était à vendre pour un prix dérisoire dans la citadelle. Sans même nous donner le temps de réfléchir, nous l'achetâmes, ainsi qu'une ferme dans la campagne toute proche.
Les Corses nous furent immédiatement sympathiques. C'est un peuple intelligent, spontané, hospitalier et d'une loyauté peu commune. Si j'avais rencontré un "bandit corse" - sans doute aujourd'hui un mythe -, je lui aurais accordé ma confiance plus volontiers qu'à certaines gens que j'ai connues à Paris, Londres ou New York.
La gentillesse de la population à notre égard était touchante. Comme nous avions exprimé devant les gens du pays le regret que le jardin de la ferme manquât de fleurs, nous le trouvâmes, l'année suivante, entièrement fleuri par leurs soins. Dans les cafés du port, où nous allions souvent entendre chanter les pêcheurs, ceux-ci ne manquaient pas de nous offrir à boire.
Une femme du pays, Restitude Orsini, qui faisait notre service quand nous étions à Calvi, eut un geste particulièrement émouvant. Ayant eu connaissance de nos difficultés d'argent, elle vint tout exprès à Paris nous apporter ses économies.
Une autre année, me trouvant seul à Calvi, j'habitais la ferme et y avais organisé un souper pour les pêcheurs. A la tombée du jour, je vis arriver une caravane de voitures qui apportaient, avec mes invités, tout un ravitaillement: langoustes, cabris, fruits divers en abondance et boissons variées: vin, champagne, cognac, liqueurs, etc... Ils avaient même apporté des lampions multicolores qu'ils suspendirent aux branches. En un instant, le jardin illuminé prit un air de fête. Devant mon air étonné et un peu inquiet, ils crurent devoir me rassurer: "Ne vous en faites pas, nous n'allons pas vous présenter la note !"
"En exil"
Chapitre XI
1928
Départ en groupe pour Calvi.
pp. 328-329
La vieille amie que nous avions fait dîner avec le "professeur Andersen" habitait Nice. Je l'invitai également, ajoutant pour la décider que nous la ferions passer pour une reine voyageant incognito; Hélène Trofimoff serait sa dame d'honneur, et nous tous formerions sa suite !
Le jour du départ, nous l'attendions sur le quai d'embarquement, au milieu de l'attroupement provoqué par la présence de mes musiciens, et elle monta à bord au son de la guitare et de la flûte. J'avais téléphoné à des amis, à Calvi, pour leur dire de nous préparer une réception digne de la souveraine que j'amenais. Malheureusement, la traversée fut mauvaise et, à l'arrivée, la pauvre reine avait perdu toute son allure. Calvi ne lui fit pas moins un accueil enthousiaste. Les jours suivants se passèrent en excursions dans cette île enchanteresse. Je n'avais qu'une minuscule voiture Rosengart. Or nous étions très nombreux. Je louai un camion ouvert où on plaçait des chaises et un fauteuil pour la "reine". C'est dans ce char à bancs improvisé que nous courions les routes de Corse. Nous allions quelquefois le soir dans les cafés du port et dansions avec les pêcheurs. Nos musiciens nous accompagnaient partout, et j'organisais aussi des sérénades sous la fenêtre de la "reine" qui paraissait au balcon et remerciait en agitant son mouchoir.
Chapitre XII
1928-1931
Calvi
pp. 334-335
Jean-Christophe Orticoni de Massa26/10/2014