RUSSIA BEYOND (en LIEN sur notre site)
https://fr.rbth.com/histoire/84352-napoleon-raison-invasion-russie Voici quatre raisons pour lesquelles Bonaparte a combattu l'Empire russe.
Napoléon Bonaparte (1769-1821), l'empereur de France (1804-1814, 1815), avait l'ambition d’étendre son emprise sur l’ensemble de l'Europe continentale, ce qui signifiait non seulement le contrôle politique des États européens, que Napoléon a obtenu grâce à ses campagnes militaires victorieuses, mais aussi celui des mers et des principaux ports maritimes de commerce.
En 1807, l'empereur Alexandre Ier de Russie et Napoléon ont signé le traité de Tilsit, qui a mis fin à la guerre de la Quatrième Coalition (Russie, Prusse, Saxe, Suède et Grande-Bretagne contre la France), accordant la victoire à la France. Selon le deuxième traité de Tilsit, signé entre la France et la Prusse, le roi de cette dernière a par ailleurs cédé à Napoléon près de la moitié de ses territoires d'avant-guerre. Sur ces terres, Napoléon a créé le royaume de Westphalie, le duché de Varsovie et la ville libre de Dantzig ; les autres territoires cédés ont quant à eux été attribués à des États clients de la France et à la Russie.
Entrevue de Napoléon Ier et d'Alexandre Ier sur le Niémen. 25 juin 1807, Traité de Tilsit par Adolphe Roehn
Château de Versailles
Le traité de Tilsit entre la Russie et la France a donc fait de ces deux grands empires des alliés contre la Grande-Bretagne et la Suède. Cela a cependant créé une situation difficile qui, très vite, en 1809, a abouti à la guerre de la Cinquième Coalition – celle de l'Empire autrichien et du Royaume-Uni contre la France de Napoléon et ses États alliés. La Prusse et la Russie n'ont pas participé à ce conflit, mais il est apparu que la Russie était le prochain pays sur la liste de Napoléon. En 1811, celui-ci a d’ailleurs déclaré à l’adresse de Dominique Dufour de Pradt, l'ambassadeur français à Varsovie : « Dans cinq ans, je serai le maître du monde ; il ne reste que la Russie, mais je l'écraserai ». L'« amitié » des deux empereurs était par conséquent pour le moins fragile. « C’est un véritable grec du Bas-Empire », disait Napoléon à propos d'Alexandre, qui se distinguait par son insaisissabilité et n'aimait pas être franc.
Un médaillon français de la période post-traité de Tilsit montrant les empereurs russes et français s'enlacer
Domaine public
La Russie n'a pas rejoint le blocus continental du Royaume-Uni
Selon le traité de Tilsit, la Russie devait se joindre au blocus continental contre le commerce maritime britannique, qui devait interdire à la Grande-Bretagne d'exporter des marchandises vers l'Europe continentale. Et qu'exportait-on principalement à l'époque ? Du fer et des textiles – des besoins de base de toute armée ayant besoin d'armes et d'uniformes. Avec le blocus, Napoléon voulait donc aussi priver les armées des pays européens, Russie comprise, de leurs approvisionnements. En outre, à cause du blocus, les exportations de céréales de la Russie, selon l'historien russe Lioubomir Beskrovny, ont été divisées par quatre.
L'empereur Napoléon Ier (1769-1821) par Jacques-Louis David, 1807
Harvard Art Museums
Le blocus était donc clairement à l'opposé de ce que la Russie en tant que puissance politique souhaitait et nécessitait, tout comme les autres États européens. Les ordres directs donnés par Napoléon à sa marine pour capturer et retenir les navires de commerce des nations brisant le blocus s’avéraient par conséquent souvent inutiles. En 1810, la Russie a ainsi poursuivi ses échanges commerciaux avec la Grande-Bretagne, et plus encore, a augmenté les droits de douane sur les marchandises françaises. Il s'agissait d'une infraction ouverte.
Offensé par deux refus de mariage de la part de princesses russes
Napoléon n'avait pas de sang royal, et voulait donc rejoindre la royauté par le biais d’un mariage. Par deux fois, il a demandé la main de princesses russes. Ce faisant, il espérait également contrôler la politique de la Russie par le biais d'une influence privée. Tout d’abord, en 1808, peu après le traité de Tilsit, le ministre français des affaires étrangères Charles-Maurice de Talleyrand a personnellement transmis à Alexandre Ier la proposition de Napoléon à la grande duchesse Catherine Pavlovna (1788-1819), la sœur du tsar. La proposition a toutefois été refusée par Alexandre, dans son style caractéristique de ne rien dire de précis.
Catherine Pavlovna par Johann Friedrich August Tischbein
Domaine public
En 1810, Napoléon a réalisé une nouvelle proposition, cette fois à Anna Pavlovna (1795-1865), âgée de 14 ans et qui deviendra plus tard reine des Pays-Bas, également sœur d'Alexandre. Après un nouveau refus, Napoléon a rapidement épousé Marie-Louise (1791-1847), fille de François Ier (1768-1835), l'empereur d'Autriche. C'était une décision évidente : Napoléon avait besoin de cette alliance avec l'Autriche s'il voulait faire la guerre à la Russie. Son mariage a donc exacerbé les tensions entre les deux empires, déjà très palpables.
Anna Pavlovna
Musée régional d'art de Mourmansk
La Russie s'est alliée à la Suède, qui a quitté la coalition de Napoléon
À cette époque, Napoléon était en train de constituer une armée européenne alliée internationale. Un seul État a cependant refusé de soutenir la Grande Armée : la Suède, dirigée par... Jean-Baptiste Bernadotte (1763-1844), un ancien maréchal de l'Empire français devenu Charles XIV Jean de Suède grâce à ses sages intrigues politiques. De par son désir d'être un souverain indépendant, Bernadotte ne s'est pas intégré dans le système de Napoléon, tous deux devenant alors ennemis.
Jean Baptiste Bernadotte
Château de Versailles
En janvier 1812, Napoléon a donc envahi la Poméranie suédoise. En mars, Bernadotte a néanmoins choisi d'allier la Suède à la Russie et Alexandre a de son côté promis au souverain suédois de l'aider à devenir également roi de Norvège (ce qui se produira effectivement plus tard).
L'alliance avec la Suède s’est révélée décisive pour la Russie. Peu de temps après, le 28 mai 1812, l’Empire russe a signé le traité de Bucarest avec l'Empire ottoman, qui a mis un terme à une guerre de six ans. Les Ottomans se sont alors également engagés à se retirer de leur alliance avec la France. Le traité, signé par le commandant russe Mikhaïl Koutouzov, a été ratifié par Alexandre Ier de Russie 13 jours seulement avant l'invasion de la Russie par Napoléon.
Traversée du Niémen par l'armée napoléonienne