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La destinée manquée du fils naturel de Napoléon, Alexandre Walewski


La destinée manquée du fils naturel de Napoléon, Alexandre Walewski
PROPOS LIMINAIRE 

Il s’agit ici d’une contribution relative à l’enfant d’Ajaccio devenu Napoléon 1er, Empereur des Français, contribution qui évoque la liaison de l’Empereur et de la comtesse polonaise Marie Walewska, ainsi que la naissance de leur fils 
Alexandre Joseph Florian Walewski.
Le roman de leurs amours et la destinée du fils naturel de l’empereur ont inspiré quelques lignes à l’un de nos amis, Jean Pascal PIERRE di SAVONA, lequel suggère d’ailleurs qu’un film soit tiré de cette histoire sentimentale qui aurait pu s’inscrire tout de même, nous le verrons, dans la grande Histoire.   
Ce texte est à rapprocher d'un texte voisin relatif à la "triple vie" de Carlo Andrea POZZO DI BORGO, connu pour avoir, quant à lui, entretenu avec Napoléon, des sentiments de haine et des désirs de vindicte équitablement partagés.  
Mais laissons s'exprimer PIERRE DI SAVONA.

                                                                                                     

Que serait devenu le 1er Empire de Napoléon, si l’Empereur, après sa première abdication (6 avril 1814), avait repris sa liaison avec la comtesse Marie Walewska, venue le visiter à l’île d’Elbe (1er au 3 septembre 1814), accompagnée de leur fils commun, Alexandre Joseph Florian Colonna Walewski, enfant naturel non reconnu, né le 4 mai 1810 ?
Qui était donc Marie Walewska, pour oser ainsi venir « relancer » l’empereur exilé en son très modeste territoire de l’île d’Elbe ?
La comtesse Walewska, née Marie Laczynska, issue de la petite noblesse rurale polonaise, était une fort belle jeune femme, mariée depuis 1804, à l’âge de 17 ans, au vieux comte Athanase Colonna Walewski, septuagénaire de haute noblesse polonaise dont la famille se prévalait également d’une ascendance  nobiliaire romaine (Colonna). 
Elle avait approché pour la première fois Napoléon en janvier 1807, alors qu’il se présentait en libérateur de la Pologne contre les occupants prussien, russe et autrichien. Leur liaison, quasi officielle, dura jusqu’en 1810. 
De cette liaison naquit le 4 mai 1810 un enfant, Alexandre Joseph Florian, que le vieil époux de Marie Walewska eut la bonté de reconnaître pour fils, et que Napoléon fit comte Walewski et de l'Empire par décret du 5 mai 1812.
Mais en 1810 Napoléon, épousait (1-2 avril)  Marie Louise de Habsbourg-Lorraine, fille aînée de l'Empereur François 1er d'Autriche.
De l’union, dictée par des considérations politiques, entre Napoléon et Marie Louise,  naquit le 4 avril 1811 un fils, Napoléon François Charles Joseph Bonaparte, qui fut proclamé sur le champ « roi de Rome » à la manière d’une antique coutume du Saint-Empire romain germanique, ou tout simplement parce que son auguste père considérait Rome comme la seconde ville de l’Empire.
Les Chambres nées de l'acte additionnel aux constitutions de l'Empire du 22 avril 1815  le reconnurent comme successeur de son père, Napoléon 1er, sous le nom de Napoléon II, après la seconde abdication de Napoléon 1er, le 22 juin 1815, au lendemain de la bataille de Waterloo, (18 juin 1815). 
Napoléon II ne « règnera », si l’on peut dire, que du 22 juin au 7 juillet 1815. Marie Louise, nommée régente en 1813, avait en effet fui Paris pour l’Autriche fin mars 1814 avec son fils, que Napoléon, décédé à Saint Hélène le 5 mai 1821, ne revit plus jamais.
Ce rappel minimise le rôle de Marie Louise en tant que régente. Le fils légitime de Napoléon, devenu en 1818 duc de Reichstadt par décision de son grand père, l’empereur d’Autriche François 1er, intégra l’aristocratie de la cour impériale des Habsbourg. Il mourut de tuberculose à Schönbrunn le 22 juillet 1832, à l’âge de 21 ans. 
A partir de la première abdication de Napoléon, la lignée de descendance directe de l’empereur n’était plus réellement assurée par son enfant né de Marie Louise et « retenu » en Autriche, mais par Alexandre Joseph Colonna, enfant naturel alors âgé de quatre ans, que la comtesse Walewska avait rappelé au bon souvenir de son père biologique Napoléon alors que ce dernier venait de se voir « généreusement » octroyer par les vainqueurs la souveraineté sur l’île d’Elbe à défaut de celle sur la Corse (refus de la France) ou sur la Sardaigne.  
Il n'est d'ailleurs pas saugrenu de penser - supposition modérément hasardeuse - que Carlo Andrea Pozzo Di Borgo, conseiller du Tsar  Alexandre 1er , qui après avoir été des années durant un "juif errant du bonapartisme" poursuivi par la vindicte napoléonienne, n'ait suggéré  l'idée de confier à l'empereur vaincu et déchu une souveraineté dérisoire sur l'île d'Elbe, située à quelques encablures de son île natale, exerçant par là-même ce que d'aucuns ont pu appeler une "vengeance de Corse".
 
Ainsi, après sa première abdication et sa rencontre avec  Marie Walewska à l’île d’Elbe, Napoléon, en refusant de se doter d’un autre héritier possible, a tourné le dos à ce qui aurait pu constituer une autre page de l’histoire. Mais il était encore enivré de grandeur,  ne pouvait envisager un déni du Code Civil qu'il avait lui-même fait rédiger (impossibilité de reconnaître un enfant adultérin), ou, très vraisemblablement, ménageait  l’Autriche, espérant encore obtenir pour « l’aiglon » un destin impérial.
Au lieu de cela, l’Histoire a retenu les dures conditions de sa déportation sur le rocher de Sainte Hélène, où « mort, il les faisait trembler encore », le transfert de ses cendres aux Invalides sous le règne de Louis-Philippe en 1840, puis en 1940, celles de son fils François Charles Joseph Bonaparte, sur l’ordre d’un Hitler désireux de s’attirer quelques sympathies dans une France vaincue, humiliée et occupée, ou peut-être, secrètement admiratif du génie de Napoléon 1er désirait-il lui rendre un hommage particulier en  ramenant près de lui les cendres de son fils.
Pourtant, Napoléon 1er était en mesure de maîtriser sa succession dès l’île d’Elbe, de la proclamer dans la période des Cent jours après sa remontée fulgurante de la vallée du Rhône, du golfe Juan au palais des Tuileries à Paris, porté de bras en bras par les paysans, les sous-officiers, les soldats, les femmes et les hommes du peuple de Paris jusqu’en haut de l’escalier d’honneur du palais.
Une succession problématique dans l’immédiat, mais « jouable » dès 1832, année de la mort à 21 ans du jeune duc de Reichstadt puis en 1847 au décès de Marie Louise de Habsbourg devenue entre temps duchesse de Parme (1815), et qui avait épousé successivement l’Autrichien Neipperg (1821) puis Charles-René comte de Bombelles (1834), un Français exilé lors de la révolution de 1789, passé au service de l’Autriche.
Alexandre Joseph Colonna, comte Walewski, était âgé de 22 ans en 1832 et de 37 ans en 1847. Dans la descendance directe de Napoléon 1er, il était donc le mieux « positionné » bien qu’enfant naturel non reconnu par l’Empereur.
A aucun moment, le comte Walewski n’a tenté de faire valoir ses droits, laissant place aux ambitions de Charles Louis Napoléon Bonaparte, troisième fils d’Hortense de Beauharnais et de Louis Bonaparte, frère de l’Empereur, roi de Hollande de 1806 à 1810. Charles Louis Napoléon Bonaparte était devenu en effet l’héritier présomptif du trône impérial après le décès de son frère aîné Napoléon Louis en 1831, puis du duc de Reichstad en 1832.
Charles Louis Napoléon Bonaparte se fit proclamer Empereur des Français sous le nom de Napoléon III, en 1852, après deux tentatives avortées en 1836 et 1840  contre le roi Louis Philippe 1er,  et après avoir aboli la République par le coup d’État du 2 décembre 1851. Celle-ci l’avait pourtant porté à la Présidence le 10 décembre 1848.
Si le comte Walewski s’était manifesté dès 1832, à 22 ans, le contexte politique d’alors aurait peut-être favorisé son accession au pouvoir. C’est en 1832 en effet  que mourut à Schönbrunn le duc de Reichstadt et que la toute récente monarchie constitutionnelle de Louis Philippe (1830) était contestée tant par les légitimistes que les républicains et les bonapartistes, tandis que le soulèvements des canuts à Lyon (1831) ajoutait aux désordre ambiant.
Il n’aurait pas eu à procéder à l’abolition d’une République, ce que fit le Prince-Président en 1851 pour accéder au trône impérial, mais à se substituer simplement à une monarchie à bout de souffle.
Comment les institutions politiques françaises auraient-elles évolué si le comte Walewski, avait fait valoir son ascendance impériale naturelle à l’âge de 22 ans ? Auraient-elles pris la forme d’une restauration impériale pure et simple, d’un régime impérial fidèle à l’acte additionnel  aux constitutions de l’empire du 22 avril 1815, ou d’une république présidentielle ? Ceci est pure conjoncture, mais laisse place à toutes les supputations.
Mais le jeune comte polonais  Alexandre Colonna Walewski,  pourchassé par la Russie pour son activité en faveur de l’indépendance de la Pologne, était devenu, avec quelque légitimité, convenons en,  citoyen français en août 1833.  Il se mit derechef au service de sa nouvelle patrie. C'est ainsi qu'il fut agent secret en Pologne au bénéfice de Louis Philippe en 1830, officier au service de la France,  notamment en Algérie (1830-1839) puis, bénéficiant des bonnes grâces de son parent le Prince-Président Louis Napoléon, ministre plénipotentiaire et ambassadeur (1849-1851), Sénateur sous le Second Empire en 1855, Ministre français des Affaires étrangères cette même année, Ministre d'État avec la direction des Beaux-Arts, Député au Corps législatif en 1865, Président de ce même Corps législatif de 1865 à 1867, à nouveau Sénateur (1867-1868).
Une telle existence pourrait constituer la trame d’une réalisation cinématographique où le romantisme des situations se mêlerait aux évènements historiques. Elle permettrait de rappeler les riches heures de l’épopée napoléonienne, tout en sortant d’un oubli regrettable le comte Walewski, patriote polonais, Français par filiation paternelle, et européen convaincu.